L’allocation aux adultes handicapés (AAH), créée en 1975 pour assurer un minimum de ressources aux personnes en situation de handicap qui ne disposent pas de revenus d’activité, connaît une croissance ininterrompue depuis sa création, qui tend à s’accentuer depuis une dizaine d’années. Son montant mensuel est de 900 €. Pour les allocataires vivant seul qui perçoivent le complément de ressources qui s’ajoute à l’allocation, l’AAH peut atteindre 1 040 € par mois, soit près du double du RSA.
Entièrement financée par l’État, la dépense liée à l’AAH s’est élevée à 9,7 Md€ en 2018 et atteindrait 10,3 Md€ en 2019. Avec plus d’un million d’allocataires, l’AAH est ainsi le deuxième minimum social en France ; il est, à la fois l’un des principaux instruments de la politique de lutte contre la pauvreté et un élément majeur de la politique en faveur des personnes handicapées.
Ces évolutions relevées par la Cour des comptes l’ont conduit à dresser un tableau d’ensemble sur l’AAH dans un rapport public thématique dédié publié fin novembre 2019. L’institution y analyse la conception d’ensemble de l’allocation depuis sa gestion jusqu’aux modalités concrètes d’attribution. Face à la hausse des crédits affectés à l’AAH et pour bénéficier de critères d’attribution plus “objectifs” évitant ainsi les disparités entre départements, elle y pointe des réformes qu’elle juge “indispensables”:
- L’AAH-2, dans sa configuration actuelle, serait une source d’incertitude voire de risque budgétaire, dans la mesure où le nombre d’allocataires et la dépense associée aux prestations augmentent chaque année, dans des proportions bien supérieures à la seule tendance démographique et sans que les causes en soient connues,
- Plus généralement, les modalités d’attribution de l’AAH poseraient des problèmes d’équité territoriale et d’égal accès aux droits relève la Cour des comptes.
Plus précisément, parmi les principales difficultés relevées :
- La notion de handicap a considérablement évolué depuis le début des années 2000 : Celle-ci est fondée sur une altération de fonction – psychologique, physiologique ou anatomique – qui se combine avec des facteurs extérieurs ou environnementaux, indépendants de la personne, pour créer une entrave à l’autonomie ou affecter la vie quotidienne ou sociale,
- Cet élargissement de la notion de handicap se heurte au besoin de disposer de critères d’attribution les plus objectifs possibles ; or, le niveau de connaissance des bénéficiaires est jugé faible…,
- La prise de décision au sein des MDPH et des CDAPH se fait désormais selon un processus qui peut être qualifié de traitement de masse, dans lequel l’État ne joue plus qu’un rôle de financeur…
- L’absence de mécanisme de détection ne permet par ailleurs pas de lutter contre d’éventuelles fraudes aux aides sociales…
Parmi les recommandations de la Cour des Comptes :
- Instituer a minima une contre-visite médicale obligatoire avant toute première attribution de l’AAH 1 (pour les personnes dont l’incapacité reconnue est supérieure à 80 % (handicaps lourds)),
- Instaurer un entretien d’évaluation de l’employabilité préalablement à l’attribution de l’AAH-2 (pour les personnes dont l’incapacité est évaluée entre 50 % et 80 % et qui sont considérées comme éloignées de l’emploi),
- Mettre en place des mécanismes de contrôle de l’attribution à bon droit, en systématisant le contrôle interne au sein des MDPH et en créant une mission nationale de contrôle, compétente sur le plan médical etc.
→ Lire le rapport public thématique de la Cour des Comptes sur l’AAH publié fin novembre 2019 et la synthèse destinée à faciliter la lecture et l’utilisation du rapport.