Lancé en juin 2015, le “Plan préfectures nouvelle génération” (PPNG) avait pour objectif de s’inscrire dans l’avenir en s’appuyant sur le numérique, en facilitant les démarches des usagers grâce à la dématérialisation des demandes de carte grise, de cartes nationales d’identité et de passeports, ou de permis de conduire. Ces démarches s’effectuent désormais, en partie ou entièrement, auprès de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), sur internet. L’objectif à terme : dématérialiser l’ensemble des démarches administratives d’ici 2022.
Destinataire de nombreuses saisines relatant plusieurs de difficultés rencontrées avec l’ANTS de la part de plusieurs milliers d’usagers, le Défenseur des Droits constate dans une décision adressée au gouvernement le 3 septembre 2018 une dématérialisation qui “a donné lieu à de nombreuses atteintes aux droits des usagers du service public“, une dématérialisation “trop rapide des services publics entraîn(ant) des risques d’exclusion“.
Parmi les difficultés pointées du doigt par le Défenseur des Droits :
- des blocages informatiques,
- la sous-évaluation du flux des demandes,
- des difficultés mal prises en compte d’accès et de maîtrise d’internet pour une part importante de la population,
- un manque d’information des publics concernés avant la généralisation du processus de dématérialisation,
- un manque d’anticipation des besoins d’accompagnement du public,
- une phase d’expérimentation manifestement insuffisante, un manque d’expertise et de formation des nouveaux opérateurs,
- un dispositif mis en place sans que toutes les procédures particulières relatives aux publics professionnels et vulnérables concernés n’aient été envisagés,
- l’absence d’une phase transitoire et d’une voie alternative papier qui aurait permis d’identifier et de pallier progressivement l’ensemble des difficultés soulevées…
Dans sa décision, le Défenseur des Droits rappelle au Premier ministre et le ministre de l’Intérieur que la “responsabilité de l’Etat est de ne pas dématérialiser un service sans mettre à disposition une alternative papier ou humaine, faute de quoi l’usager perd toute possibilité d’échanger avec l’administration lorsqu’un bug informatique se produit ou lorsqu’un dossier est perdu“.
Dans la perspective du plan “100% des démarches dématérialisées en 2022” et face à ces nombreux dysfonctionnements, le Défenseur des Droits demande une alternative papier ou humaine et recommande notamment l’introduction dans la loi d’une “une clause de protection des usagers vulnérables, prévoyant l’obligation d’offrir une voie alternative au service numérique dans le cadre de la mise en œuvre de toute procédure de dématérialisation d’un service public“.
Plus particulièrement sur l’absence de prise en compte des besoins spécifiques de certains publics vulnérables, il préconise ainsi par exemple :
- De garantir une accessibilité totale des procédures de l’ANTS aux personnes en situation de handicap ;
- De former des agents d’accueil et mettre en place un accompagnement spécifique ;
Sur les difficultés liées à l’insuffisance de l’accompagnement du public dans les points numériques, il prône par ailleurs de veiller à une affectation systématique des moyens suffisants en personnel et matériel, sur l’ensemble du territoire.
→ Lire la décision du Défenseur des Droits du 3 septembre 2018 à l’attention du Premier ministre et du ministre de l’Intérieur :